Culture & innovation

Mois : février 2021

La créativité (Part 3)

La créativité artistique

Selon les résultats d’une étude menée par l’écrivain et chercheur américain Brewster Ghiselin autour du processus créatif de personnages célèbres, il existe deux formes qualitativement différentes de productions créatives : d’une part la créativité « secondaire », qui ne fait qu’étendre un ou des concepts connus dans un nouveau domaine d’application et, d’autre part, la créativité « primaire », qui provoque un changement fondamental dans notre perception de la réalité. On peut alors proposer une typologie des différentes contributions créatives, selon qu’elles acceptent le paradigme actuel du champ, le rejettent, ou synthétisent plusieurs paradigmes provenant de champs différents. Selon Teresa Amabile, trois composantes sont nécessaires à la créativité : la motivation, les capacités dans le domaine et les processus liés à la créativité. La motivation va englober les raisons intrinsèques et extrinsèques pour lesquelles l’individu s’engage dans une tâche, et l’aptitude d’une personne vis-à-vis de la tâche à accomplir. Les capacités dans un domaine font référence à la connaissance, aux capacités techniques, et aux talents particuliers dans un domaine précis. Enfin, les processus liés à la créativité incluent un système cognitif qui permet d’affronter plus facilement la complexité et l’interruption de la réflexion pendant la résolution d’un problème, l’utilisation de méthodes pour produire de nouvelles idées et un style de travail caractérisé en partie par la persévérance et l’attention soutenue pour une tâche. Dès lors, les ressources nécessaires à la créativité sont des aspects spécifiques d’intelligence, de connaissance, de styles cognitifs, de personnalité, de motivation et de contexte environnemental, qui peuvent fournir des stimulations physiques ou sociales pour aider à la production d’idées et pour faire aboutir ces idées. Certaines de ces composantes peuvent avoir des seuils (comme par exemple la connaissance) au-dessous desquels la créativité est impossible. De plus, il peut y avoir une compensation partielle entre composantes : une composante forte (comme la motivation) peut contrebalancer la faiblesse d’une autre composante (comme la connaissance). Enfin, une composante agit toujours en présence d’autres composantes et cette coaction peut avoir des effets interactifs. Par exemple des niveaux élevés d’intelligence et de motivation peuvent avoir un effet multiplicateur sur la créativité.

Révéler son potentiel

Ainsi, les potentiels de créativité d’un individu dans divers champs d’activité résultent de la combinaison interactive des différents facteurs évoqués plus haut, rapportés aux caractéristiques nécessaires pour un travail créatif dans chacun de ces champs d’activité. Ces dispositions exceptionnelles vont être mises en évidence dans des productions réalisées par certaines individualités ou certains groupes. La créativité de ces productions est alors évaluée dans un contexte social donné. Les connaissances d’un individu, ses buts et son état affectif (joie ou frustration par exemple) se développent au fil du temps et interagissent pour modifier la façon dont il réagit aux aspects inattendus d’une tâche, et le guider vers des productions créatives. Ces aspects inattendus autant qu’expérimentaux auront une part importante à jouer dans la révolution musicale des années soixante et soixante-dix, dans les contextes croisés de la révolution des mœurs et de la consolidation de l’industrie musicale.

A suivre…

Extrait de « Parfois ça dégénère » par M. Alvarado, Ed. Bookelis, 2020.

Le courage de l’artiste pour créer la rupture

De Dada aux punks, une histoire du XX° siècle

Comment provoquer la rupture, et dans quel but ? Dans les années cinquante et soixante, le mouvement situationniste se fait le chantre de la déstabilisation artistique, et par là-même, sociétale. Son moyen : le détournement. Dans la lignée du mouvement Dada, né à Zurich en février 1916, les théoriciens de l’Internationale Situationniste vont décocher leurs flèches sous forme de succession de manifestes. Pour l’un de ses membres fondateurs, Raoul Vaneigem, « les dadaïstes ont édifié le premier laboratoire d’assainissement de la vie quotidienne. Le groupe Dada était l’entonnoir où s’engouffraient les innombrables banalités, la notable quantité d’importance nulle au monde. Par l’autre bout, tout sortait transformé, original, neuf. Les êtres et les objets restaient les mêmes et cependant tout changeait de sens et de signe ». Critiques par rapport à la réification en marche des œuvres d’art sous la coupe de la « société du spectacle », les situationnistes continueront leur mouvement de déconstruction jusqu’à leur dissolution en 1972. « Si limitée quelle soit, si spéculative qu’elle demeure, une telle agitation ouvre la voie à la spontanéité créatrice de tous, ne serait-ce qu’en prouvant, dans un secteur particulièrement falsifié, que le détournement est le seul langage, le seul geste, qui porte en soi sa propre critique. La créativité n’a pas de limite, le détournement n’a pas de fin », proclame Vaneigem. Quelques années plus tard, quelques agitateurs britanniques sauront s’en rappeler pour animer le feu du mouvement punk.

Seuls les costauds survivent

« Pour l’essentiel, l’histoire s’occupe des vainqueurs, écrit Becker. Et l’histoire de l’art enregistre les innovations qui remportent des victoires institutionnelles, celles qui réussissent à s’entourer de tout l’appareil d’un monde de l’art, qui entraînent suffisamment de partisans à coopérer régulièrement et promouvoir ainsi les idées nouvelles ». Les changements qui ne parviennent pas à conquérir un réseau de coopération existant, ou à en créer un autre, restent sans lendemain. Ainsi, Becker désigne les trois principales évolutions qu’il a constatées dans l’histoire de l’art : le glissement, l’adaptation et la révolution. Le glissement ne représente pas un véritable changement parce qu’il n’exige aucune réorganisation profonde des activités institutionnelles. Les personnes qui tiennent à fonctionner différemment ne dérangent pas les autres. Le personnel d’exécution n’est pas obligé de fabriquer un nouveau matériel ou de renouveler sa technique d’interprétation. Dans l’adaptation, les innovations obligent certains participants à apprendre à faire des choses différentes, ce qui les perturbe et remet en cause leurs intérêts. Les membres d’un segment du monde de l’art qui ne se seraient pas adaptés à ces divers changements peuvent se laisser distancer et s’apercevoir un beau jour qu’ils ne sont plus en mesure de remplir leur rôle. Enfin surgit la révolution : ici, les innovations bouleversent les modes de coopération habituels, les acteurs ne peuvent plus coopérer comme avant, ils ne peuvent plus produire comme d’habitude les œuvres qu’ils savent réaliser. Quand surviennent des innovations révolutionnaires, avec les transformations qu’elles déclenchent dans le langage conventionnel de l’art, ce ne sont plus les mêmes personnes qui agissent ensemble, et elles ne font plus les mêmes choses. C’est ce qui va se passer avec la révolution du rock.

Car l’innovation de rupture va évidemment se positionner dans un contexte de révolution. On va assister, précise Becker,  à une offensive contre le fonctionnement normal du monde de l’art concerné. Au plan des idées, elle prend la forme de manifestes, de textes critiques, de remises en cause esthétiques et philosophiques, et d’une réécriture de l’histoire de la discipline qui renverse les anciens modèles et idoles, pour saluer l’œuvre nouvelle comme l’expression de valeurs esthétiques universelles. Au plan de l’organisation, elle vise à la mainmise sur les sources de financement, les publics et les systèmes de communication et de distribution. Cependant, les révolutions ne changent pas tous les modes d’activité coopérative régis par des conventions : « si le changement était complet, ajoute Becker, il ne s’agirait plus d’une révolution, mais de la formation d’un monde de l’art totalement nouveau ». Dans l’industrie musicale, nous verrons que les révolutions majeures de la fin du XX° siècle ont bien été diffusées par les structures professionnelles en place.

La mauvaise réputation

L’innovateur, dans un monde de l’art particulier, a-t-il bonne réputation ? Et quels rapports entretiennent la réputation existante d’un artiste avec son potentiel d’innovation dans la production artistique ? Nous l’avons vu avec Schumpeter, l’innovation dans l’industrie et les services émane majoritairement de nouveaux entrants. En est-il de même dans l’art ? Selon Becker, la réputation artistique dans un monde de l’art déterminé va se porter principalement sur des gens possédant des dons inusuels, qui créent des œuvres remarquables et profondes qui expriment des émotions humaines et des valeurs culturelles essentielles. Les qualités de l’œuvre attestent des dons particuliers de leur auteur, de même que les dons particuliers pour lesquels cet auteur est déjà connu garantissent la qualité de l’œuvre.

Pour autant, les réputations des artistes, des œuvres, des genres et des disciplines découlent de l’activité collective des mondes de l’art, au sein desquels, bien souvent, les mêmes gens coopèrent régulièrement, de façon routinière, pour produire des œuvres semblables de manière semblable. Ils organisent leur coopération en s’en rapportant aux conventions en vigueur dans le monde où de telles œuvres sont produites et consommées. Les conventions facilitent l’action collective et permettent d’économiser du temps, des efforts et des ressources. Le royaume des conventions est donc par nature peu innovant. « Il n’est pas pour autant impossible de travailler en dehors des conventions. C’est simplement plus difficile et plus coûteux », conclut Becker. L’artiste qui met sa réputation en jeu en innovant n’en aura que plus de mérite, conscient du quitte ou double qu’il joue face à l’industrie et face à son public.

Extrait de « Parfois ça dégénère », par Marc Alvarado, Ed. Bookelis, 2020

La créativité (Part 2)

Comment définir la créativité ?

Le champ d’étude de la création est vaste : artistique et scientifique, au départ, il s’étend par la suite  à de nombreuses activités dans lesquelles la valeur des idées va être analysée dans son contexte. La créativité peut être approchée comme la capacité à réaliser une production qui soit à la fois nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste. Par production nouvelle, on entend une production originale et souvent imprévue : elle se distingue de ce que le créateur ou d’autres personnes ont déjà réalisé. Elle peut par contre représenter divers degrés de nouveauté : elle peut ne présenter qu’une déviation minime par rapport aux réalisations antérieures, ou au contraire, s’avérer être une innovation importante. Mais une production créative ne peut être simplement une réponse nouvelle. Elle doit également être adaptée, c’est-à-dire qu’elle doit satisfaire différentes contraintes liées aux situations dans lesquelles se trouvent les personnes.

Il n’existe pas de norme absolue pour juger de la créativité d’une production. Les appréciations sur la créativité impliquent cependant un consensus social. Un juge unique, un comité constitué de plusieurs personnes ou une société dans son ensemble évaluent des œuvres, des produits ou des projets et déterminent leur degré de créativité par rapport à l’existant. De la même façon, le niveau global de créativité d’une personne (ou d’un groupe) est évalué par rapport à celui d’autres individus (ou d’autres groupes). L’importance relative de la nouveauté et de l’adaptation dépend aussi de la nature des tâches proposées aux sujets. Par exemple, le critère d’adaptabilité est plus fortement mobilisé dans les productions créatives des ingénieurs que dans celles des artistes. Par ailleurs, les individus peuvent interpréter différemment les concepts de nouveauté et d’adaptation. Par exemple, en ce qui concerne la nouveauté, certains individus vont accorder plus de valeur à leur réaction immédiate et émotionnelle face à une réalisation originale, alors que d’autres vont plutôt avoir tendance à mettre en relation cette réalisation avec des productions antérieures afin de déceler une innovation éventuelle. Enfin, une idée peut être nouvelle pour une personne mais ne pas l’être pour une autre, selon leurs expériences antérieures respectives.

Outre les aspects de nouveauté et d’adaptation, il y a d’autres caractéristiques qui influencent souvent les jugements à propos de la créativité, comme la qualité technique d’une œuvre, ou encore l’importance de la production par rapport aux besoins de la société. La nature du processus de production de l’idée doit être prise en compte pour juger si une proposition originale est bien la résultante de la créativité de son auteur. Une œuvre créée par hasard ou résultant de l’application de règles énoncées par un tiers, même originale et adaptée, peut ne pas être considérée comme créative. En principe, l’acte créatif est censé se mettre en œuvre dans le cadre d’un travail soutenu et intentionnel et doit présenter la résolution concrète de problèmes de réalisation. Les travaux du chercheur en psychologie Todd Lubart ont montré en outre que l’appréhension de la créativité peut varier selon la culture et l’époque. Ainsi dans certaines cultures, la créativité est centrée sur la production en rupture avec la tradition, alors que d’autres cultures vont valoriser le processus de création lui-même, plutôt que le résultat et/ou l’utilisation novatrice par rapport aux éléments traditionnels de la culture.

Si l’acte créatif en lui-même est difficile à cerner en dehors de son contexte historique et technique, il en est de même pour la personnalité du créateur. Une production créative – ou plus généralement une conduite créative – peut être nouvelle ou originale au regard de l’histoire de l’humanité, c’est-à-dire antérieure à toute copie, mais peut aussi être considérée comme novatrice par rapport aux expériences précédentes de l’individu créatif. Selon cette typologie, la spécialiste en sciences cognitive Margaret Boden affecte au premier groupe le qualificatif de « créativité historique », et au second celui de « créativité psychologique ». La créativité psychologique s’observe chaque fois qu’un individu produit, en réponse au problème qu’il rencontre, une solution nouvelle par rapport à ses expériences précédentes. C’est une forme de « créativité privée », en ce sens qu’elle ne nécessite aucune reconnaissance par autrui. Cette approche permet d’exalter les capacités créatives de chaque individu, souvent circonscrites toutefois dans un domaine particulier dans lequel ils possèdent une certaine légitimité. La créativité historique, quant à elle, est un sous-ensemble restreint de la créativité psychologique, qui se révèle être nouvelle pour l’individu ainsi que pour un ensemble d’individus pouvant attester de cette nouveauté dans un temps donné. Boden précise que chaque acte créatif implique le même processus, sa valeur historique dépendant pour une grande partie de son contexte culturel. Dès lors, la dynamique de l’interaction entre la personne et l’environnement est un des aspects les plus importants dans l’analyse des caractéristiques d’adaptation de la créativité. Une conduite créative tient compte des contraintes, des facettes, du contexte dans lequel elle se manifeste ; elle est une réponse à une situation donnée, l’individu devant alors s’adapter aux exigences de son environnement.

A suivre…

Extrait de « Parfois ça dégénère » par Marc Alvarado, 2020, Ed. Bookelis

La créativité (Part 1)

Approche historique

L’étude de la créativité est restée relativement sommaire jusque dans les années 1950. La nature collective de la création primitive, la conception mystique qui a longtemps entouré l’acte de création, la rareté du génie créatif ou la complexité de ce sujet n’ont probablement pas favorisé son examen scientifique. Dans l’approche mystique, l’inspiration est souvent associée à un état non rationnel d’euphorie quasi maniaque. Pourtant pour Aristote, déjà, l’inspiration prenait ses sources dans le for intérieur de l’individu et dans l’enchainement de ses associations mentales plus que dans des interventions divines.

A partir de la Renaissance, on assiste à un renouvellement de l’intérêt pour la création artistique, littéraire, philosophique et scientifique, qui correspond à un retour aux valeurs de la civilisation grecque. La créativité est de nouveau devenue un sujet de discussion. Le XVII° siècle voit apparaitre des débats philosophiques sur le génie, et en particulier sur les fondements du génie créatif. L’Anglais Duff, dès 1767, différencie le génie créatif du talent, ce dernier impliquant un niveau de performance supérieur mais ne nécessitant pas une pensée originale. Selon lui, le génie créatif résulte d’une capacité innée impliquant l’imagination associative qui permet de combiner des idées, le jugement et l’évaluation des idées produites, ainsi que les valeurs esthétiques qui guident la recherche d’idées. La pensée qui va alors progressivement émerger postule que la créativité serait une forme exceptionnelle de génie, différente du talent, et déterminée par des facteurs génétiques et des conditions environnementales particulières. Au cours du XIX° siècle, on voit de plus en plus d’auteurs soutenir l’idée d’un génie créatif reposant sur un niveau exceptionnel d’originalité qui, lui-même, dépend de la capacité à associer les idées. Le classicisme est battu en brèche, les romantiques et les impressionnistes font bonne impression et les scientifiques s’interrogent. On oppose alors les génies réformistes (Berlioz) aux virtuoses classiques (Paganini). Pour avancer une explication, Francis Galton va, à la fin du XIX° siècle, initier l’ère de l’étude empirique de la créativité, en expérimentant notamment l’introspection sur lui-même, notant toutes les pensées qui lui traversent l’esprit durant ses promenades dans Londres.  Il avance alors que les capacités mentales, comme les caractéristiques physiques, sont d’origine génétique. Galton va également observer l’existence d’enchaînements d’impressions mentales. En définitive, la principale source d’idées nouvelles proviendrait des « objets mentaux » conservés dans la « cave de l’esprit », qui deviendraient actifs par association.

Du romantisme au pragmatisme

Le XX° siècle sera prolixe en la matière. Vers 1900, dans une série de travaux publiée sous le titre « Essai sur l’imagination créatrice », Théodule Ribot traite du rôle de l’intelligence, de l’émotion, et de l’inconscient dans la pensée créative, ainsi que de son développement et de ses différentes formes (littéraires, scientifiques, commerciales). Le Dr Catharine Cox publie en 1926 à l’Université de Stanford les résultats d’une étude génétique portant sur 300 individus célèbres pour leurs travaux créatifs. Elle montre que l’intelligence (le QI moyen de ces sujets est de 154), combinée à la motivation et à certains traits de caractère, joue un rôle important dans le niveau de créativité. De l’autre côté de l’Atlantique, le psychologue anglais Charles Spearman propose en 1931 dans un ouvrage consacré à l’esprit créatif de reconnaitre, à l’origine de la créativité, la capacité intellectuelle à former des corrélats entre idées différentes, à trouver en sorte des correspondances ou des similitudes, reprenant ainsi l’idée d’association avancée plus tôt par Galton. Puis la balle repart en Amérique avec le psychologue Joy Paul Guilford, qui effectue un pas majeur en faisant l’hypothèse que la créativité requière diverses capacités intellectuelles, comme la facilité à détecter les problèmes, les capacités d’analyse, d’évaluation et de synthèse, ainsi qu’une certaine flexibilité et fluidité de la pensée. Nous sommes en 1950. Dans un deuxième temps, il élabore une théorie factorielle de l’intelligence qui s’organise autour de cinq opérations individuelles (cognition, mémoire, pensée divergente, pensée convergente et évaluation) qui, appliquées à différents types d’informations (figuratives, symboliques, etc…) sont susceptibles de produire des résultats originaux et différents. Ce que l’on nomme la créativité semble s’appuyer sur ces différentes opérations mentales, et tout particulièrement sur la pensée divergente : la capacité à trouver un grand nombre d’idées à partir d’un stimulus unique.

Les chercheurs vont désormais s’appliquer à mettre au point tout une série de tests à cet égard, à l’instar de Guilford, encore lui, qui élabore en 1967 un modèle qui situe les opérations intellectuelles dans un processus de résolution de problèmes : les situations qui impliquent de résoudre les vrais problèmes font appel à l’ensemble des opérations intellectuelles, et donc la créativité. Il faut dire que la période – les années soixante – était particulièrement propice à l’expérimentation créative, nous le vérifierons tout au long de cet ouvrage. Il existait en outre nombre de problèmes à résoudre dans la civilisation occidentale de l’après guerre. De nombreux auteurs ont planché à cette époque sur le développement de la créativité, essayant de mettre au point des méthodes ou des programmes éducatifs destinés à la stimuler. Parmi les plus diffusés figurent la méthode du « creative problem solving » en 1962, ou encore le célèbre « brainstorming » d’Alex Osborn – un publicitaire – en 1964. Les  chercheurs affiliés à l’IPAR (Institute of Personality Research and Assessment) examinent les traits de personnalité et la nature des motivations impliquées dans la créativité. Ils avancent que plusieurs traits reconnaissables sont liés à la créativité : la confiance en soi, l’indépendance de jugement, ou encore la prise de risques. Pour l’inventeur de la pyramide des besoins, Abraham Maslow, la créativité est un moyen de réaliser ses potentialités; elle implique certains traits comme l’acceptation de soi, le courage et la liberté d’esprit. Nous sommes en 1968, la symbolique est particulièrement forte. La « critique artiste » est en passe de prendre le pouvoir.

A suivre…

Extrait de « Parfois ça dégénère » par M. Alvarado, Ed. Bookelis, 2020.

Fièrement propulsé par WordPress & Thème par Anders Norén