Culture & innovation

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Définir l’innovation (Part 5)

Nous terminons notre analyse du processus d’innovation par une approche centrée sur les acteurs et leur interrelations au sein du système : luttes de pouvoir et compromissions.

Les acteurs et le système

La sociologie des organisations va également nous apporter quelques précisions quant à la position des acteurs face au système. Pour Crozier et Friedberg, « ce qui est incertitude du point de vue des problèmes est pouvoir du point de vue des acteurs : les rapports des acteurs, individuels ou collectifs, entre eux et au problème qui les concerne, s’inscrivent donc dans un champ inégalitaire, structuré par des relations de pouvoir et de dépendance ». Ainsi, aucun des acteurs ne peut se prétendre totalement libre : il sera toujours, à un moment ou un autre, « récupéré » par le système officiel. Mais le système lui-même, selon les auteurs, est tout autant influencé, et même corrompu par les pressions et manipulations des acteurs. Le pouvoir d’un individu, ou d’un groupe, bref d’un acteur social, est fonction de l’ampleur de la zone d’incertitude que l’imprévisibilité de son propre comportement lui permet de contrôler face à ses partenaires. « Mais pas n’importe quelle zone d’incertitude, précisent Crozier et Friedberg : encore faut-il que celle-ci soit pertinente par rapport au problème à traiter et par rapport aux intérêts des partis en présence, que ce soit en somme une zone d’incertitude dont l’existence et la maîtrise conditionnent la capacité d’action des uns et des autres ».

Une négociation permanente

Les auteurs distinguent alors quatre grandes sources de pouvoir correspondant aux différents types de sources d’incertitudes particulièrement pertinentes pour une organisation : celles découlant de la maîtrise d’une compétence particulière et de la spécialisation fonctionnelle ;  celles qui sont liées aux relations entre une organisation et son ou ses environnement(s) ; celles qui naissent de la maîtrise de la communication et des informations ; celles enfin qui découlent de l’existence de règles organisationnelles générales. Ainsi, le pouvoir que pourra exercer un acteur à l’intérieur du système sera proportionnel à sa maîtrise d’une ou plusieurs de ces grandes sources. De surcroit, chacun d’entre eux dispose d’une marge de manœuvre, comme le soulignent les auteurs : « Une situation organisationnelle donnée ne contraint jamais totalement un acteur. Celui-ci garde toujours une marge de liberté et de négociation. Grâce à cette marge de liberté (qui signifie source d’incertitude pour ses partenaires comme pour l’organisation dans son ensemble), chaque acteur dispose ainsi de pouvoir sur les autres acteurs ». L’acteur va tenter à tout instant de mettre à profit sa marge de liberté pour négocier sa « participation », en s’efforçant de « manipuler » ses partenaires et l’organisation dans son ensemble de telle sorte que cette « participation » soit « payante » pour lui. Cette vision met en exergue, dans un contexte de conflit latent et de lutte de pouvoir, la capacité de l’incertitude à créer une marge de manœuvre pour certains acteurs, ce qui n’est pas dénué de sens dans l’analyse des rapports entre les artistes et l’industrie culturelle.

Extrait et références issus de l’ouvrage « Parfois ça dégénère » de Marc Alvarado, paru aux éditions Bookelis / Storymag en septembre 2020.

Jazz rock

Esprits libres et fusions des genres : les innovations musicales des années 1960/70

https://lemotetlereste.com/musiques/jazzrock/

« 1969. Le rock et le funk se vendaient comme des petits pains, mis en vitrine à Woodstock. Plus de 400 000 personnes au concert. Autant de gens, ça rend tout le monde fou, et en particulier ceux qui font des disques ». Miles Davis.

Vingt ans avant l’apparition de l’échantillonnage et de la boucle, des artistes aventuriers épris de liberté vont pratiquer le mélange des styles, dans une période sans tabou où le mot révolution n’était pas un vain mot. Les Esprits Libres, ce sont ces artistes qui, au sein de l’industrie musicale, vont lutter contre le conformisme ou contre l’oppression (artistique, commerciale ou politique). L’esprit libre, c’est l’esprit de découverte et de liberté.

« Les Esprits Libres », c’est l’histoire de cette musique qui s’est inventée à la fin des années soixante, quand le public était galvanisé par le vent du changement et porté par le progrès technologique en marche. En 1969, on a marché sur la lune, communié à Woodstock et prêté une oreille attentive aux « nouvelles directions en musique » de Miles Davis. Après Woodstock, une jeune nation s’est dressée, et avec elle, une ère de créativité sans égal s’est ouverte pour des artistes qui vont utiliser leur art pour se libérer, au propre comme au figuré, en Amérique comme en Europe.

« Jazz Rock » aux éditions Le Mot et le Reste

La conquête de l’espace

Pendant que Miles Davis, John McLaughlin ou Chick Corea poussaient vers le rock, Jimi Hendrix, Chicago ou Jack Bruce tiraient vers le jazz. Herbie Hancock se dirigeait vers le funk rejoindre Earth, Wind & Fire, issu comme lui du jazz. Joni Mitchell chantait avec Jaco Pastorius et Jeff Beck jammait avec Stevie Wonder. Les maisons de disques n’y comprenaient plus rien, et le public en redemandait. Tout au long de cet ouvrage, nous irons à la rencontre des acteurs majeurs de cette révolution, et nous analyserons, outre les genres musicaux et les œuvres abordées (jazz-rock, jazz-soul, jazz-funk, funk-rock, flamenco-rock, samba-rock, latino-rock, et d’autres encore), le contexte particulier dans lequel ces mélanges ont pu avoir lieu, et les conditions de leur diffusion dans le climat artistique, social et politique de cette vague utopique.

C’est la prise de conscience d’une jeunesse qui ne veut pas se laisser enfermer dans les conventions. C’est une parenthèse enchantée dans l’univers de la création musicale où les artistes vont, l’espace d’un instant, s’installer aux commandes du vaisseau. La conquête débute en 1969, pour quelques années où le goût de l’aventure va primer sur la rente de situation. Et effectivement, cela a rendu pas mal de gens fous…

1969 : la conquête d’une ère nouvelle

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